Des vies sans école
Interview de
Katia Chapoutier Réalisatrice

Crédit photo : Katia Chapoutier et France Télévisions

UN DOCUMENTAIRE SUR L’ÉCOLE À LA MAISON

Lorsque nous avons appris qu’un film sur l’école à la maison allait être diffusé sur France 2 le 27 avril, nous avons vite pris contact avec la réalisatrice de ce film documentaire, Katia Chapoutier.

On s’est dit que ce serait chouette que ce soit une enfant en IEF qui prépare et mène l’interview. Imraan, 11 ans, réalisatrice en herbe, a aussitôt aimé l’idée. 

Merci donc à Imraan ainsi qu’à Katia d’avoir réalisé Des vies sans école et d’avoir répondu aux questions de notre journaliste de choc !

La bande-annonce

Replay sur 

Documentaire jusqu’au 19 juin
Débat télévisé jusqu’au 6 mai

VOTRE AVIS SUR L’INSTRUCTION EN FAMILLE

Comment avez-vous eu l’idée de faire un documentaire sur ce thème ?

Ce n’est pas mon idée. J’ai quatre enfants, ce qui dans mon métier est assez rare. Donc, souvent, quand il y a des sujets liés aux enfants, on pense à moi. Cette fois-ci, c’est un producteur qui s’intéressait au sujet qui m’a proposé de faire un film sur l’école à la maison. Au début, cela ne m’intéressait pas trop : j’avais adoré l’école primaire et la seule famille que je connaissais en école à la maison, je trouvais que ce n’était pas pour de bonnes raisons. C’était une maman qui voulait se garder sa fille pour elle et je n’aimais pas ça. Donc j’avais un a priori très fort. Puis j’ai commencé à me renseigner un peu. Et là, j’ai découvert qu’il y avait tellement d’autres situations que celle que je connaissais !

Avant la réalisation de ce documentaire, comment voyiez-vous l’IEF ?

J’avais l’impression qu’en IEF, les enfants étaient coupés de la société. J’imaginais que les enfants avaient des lacunes. Et en fait j’ai découvert à quel point j’avais tort. Et c’est toute la beauté de notre métier. C’est de découvrir que bien souvent, nos a priori sont faux.

J’espère que mon film va justement montrer que les idées qu’on se fait sur l’école à la maison peuvent se révéler fausses.

L’éducation de mes enfants a changé depuis que j’ai fait ce film sur l’IEF. Lorsque je partage du temps avec eux, j’ai plus une démarche comme les parents en IEF. Mon rapport avec mes enfants a évolué d’une manière plus riche et apprenante.

Comment décririez-vous l’instruction en famille après avoir fait ce documentaire ?

L’IEF me semble maintenant un moyen de vraiment devenir un citoyen éclairé. C’est une occasion formidable de grandir avec des gens de tous les âges. Et c’est aussi une manière d’être beaucoup plus à l’écoute de nos enfants.

Comment avez-vous sélectionné les familles du documentaire ?
Et parmi combien les avez-vous sélectionnées ?

C’est compliqué car lorsque je travaille sur un nouveau sujet, je cherche des informations dans tous les sens et je laisse aussi faire le hasard. J’ai parlé à beaucoup beaucoup de familles. Je cherchais des familles qui ne soient pas en colère contre l’école. Sinon, les gens qui vont à l’école n’allaient pas écouter ce que ces familles avaient à dire. Je voulais aussi des familles où les gens ne disent pas “L’école à la maison est la seule solution” mais qu’ils parlent de leur histoire, sans essayer de convaincre tout le monde. Il me fallait aussi des familles bien différentes afin de montrer qu’il y a autant d’écoles à la maison que de familles. C’est un processus qui m’a bien pris une année pour trouver quatre familles qui étaient d’accord. Car j’ai trouvé des familles qui étaient super mais qui n’étaient pas d’accord. C’était un peu frustrant. Donc il m’a fallu un an pour trouver les quatre familles qui apparaissent dans le film.

Racontez-nous un moment marquant au cours des rencontres…

Le moment qui m’a le plus impressionné, c’est la rencontre avec les grands qui avaient fait l’IEF : Florine, Marie-Elise, Bastien. C’était incroyable et impressionnant de voir à quel point ces enfants qui, non seulement n’étaient jamais allés à l’école, mais en plus n’avaient jamais suivi le programme, étaient bien dans leur peau. Ils savaient ce qu’ils voulaient dans la vie et ils étaient très épanouis. Je trouvais que rien que par leur manière d’être, ils balayaient tous les a priori qu’on peut avoir.

Un autre moment qui m’a marqué est le voyage en Grèce pour accompagner Alexina. C’est une jeune fille qui fait de l’escrime et qui participait à une compétition d’escrime au niveau national ; les championnats de Grèce. C’était vraiment super de pouvoir être avec elle là-bas.

Si vous étiez en IEF, quel type d’IEF aimeriez-vous appliquer à vos enfants ?

C’est une vraie bonne question car sur mes quatre enfants, j’ai trois filles qui adorent l’école donc qui continueront l’école je pense. Mais j’ai un garçon pour qui l’école est moins agréable. Peut-être que pour le collège – on en parle avec son papa -, on pourrait basculer en IEF.

Sauf que nous – le papa est caméraman -, on a des métiers où on bouge beaucoup. On s’est dit que si on devait mettre notre fils en IEF, pendant quelques mois j’arrêterais de travailler. Ainsi, je serais à ses côtés pour lui apprendre à travailler avec le CNED, et il serait ensuite autonome dans ses apprentissages.

Si, en revanche, nous pouvions réaliser notre rêve de prendre une ou deux années pour voyager en famille, on ferait un IEF beaucoup plus détendu. On serait heureux d’être plus actifs et inventifs dans notre manière d’accompagner nos enfants à l’école à la maison.

Une RÉALISATION, être RÉALISATRICE

Katia Chapoutier est la réalisatrice du film
Des vies sans école,
ce qui signifie qu’elle en a dirigé la fabrication,
comme une cheffe d’orchestre.

Quel parcours faut-il faire pour devenir réalisateur/trice de documentaire ?

Cela dépend des gens. J’ai fait des études de communication et je suis d’abord devenue journaliste puis après réalisatrice un peu par hasard… Cela veut dire que j’ai appris en faisant. Cela a été un peu difficile car quand on apprend en faisant, on se trompe beaucoup. Ça peut être très douloureux.

Parfois ça peut être bien de faire des études. Le mieux, de mon point de vue, est de passer un bac pour ensuite suivre une formation audiovisuelle en alternance. Ainsi tu peux apprendre à filmer par toi-même. 

Après, c’est comme toi qui fait l’IEF à la maison. Quand tu apprends différemment, ça te permet d’avoir une certaine créativité que les autres n’ont pas forcément. Ça t’évite de rentrer dans un moule.

Les conseils de Katia

Prends un téléphone et commence à faire des films !
Imagine, ta mère va voir une copine. Dis toi que tu vas faire un film sur cette rencontre.
Il faut s’entraîner.
Autre conseil : regarde des films et prends des notes !

À quoi votre équipe ressemble-t-elle ?

Il y a 12 ans, j’ai rencontré un caméraman avec qui je me suis vite bien entendu. J’aimais comment il filmait, il avait un bon rapport avec les gens. Nous sommes devenu un couple et on a des enfants ensemble…

On a plusieurs copains qui sont ingénieurs du son et qui viennent compléter l’équipe. En tournage, on est trois dans la grande majorité des cas : mon compagnon, un ingénieur du son et moi-même.

Comment avez-vous filmé les vues de haut sur les différents paysages qui entouraient chacune des maisons ?

Avec un drône. Des drônes dans des toutes petites valises que tu peux amener partout. J’avais envie qu’il y ait ces images de drône car c’était important qu’on voit les mondes dans lesquels évoluaient ces enfants.

Comment avez-vous financé le documentaire ?

Ce n’est pas moi qui le finance. En haut, tu as la chaîne de télévision, puis la société de production (…). Je ne m’occupe pas du budget des films que je réalise. Certains réalisateurs s’y intéressent, mais moi ce n’est pas mon truc.

Tu fais ton film une fois que tu as l’accord de la chaîne TV.

Comment s’est passée la relation réalisateur et décisionnaires de la télé ?
Y avait-il des choses à ne pas dire ou est-ce que c’était ouvert ?

Cela dépend des sujets. Tu dois composer avec ça. Là, j’ai eu de la chance car les gens de l’équipe était vraiment curieux et ouverts. Ils ont aussitôt accepté ma proposition de raconter seulement des histoires où ça se passait bien. Ils s’étaient beaucoup renseignés, ils étaient à l’écoute et ils m’ont laissée faire. C’est pour ça que le film est réussi.

Un dernier mot de la réalisatrice, Katia Chapoutier

Merci beaucoup Katia d’avoir pris le temps de répondre à mes questions.

Bon film à toutes et à tous !

N’hésitez pas à en parler autour de vous, aux familles en IEF ou non 😉

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